Amis de la Capitale, vous avez sûrement remarqué la présence d’ordures et de déchets atteignant des sommets ! Oui, vous êtes bien au sein de la ville lumière qui est pourtant dans l’ombre depuis des semaines. La cause ? Une réforme des retraites entrainant de nombreuses grèves, dont celle des éboueurs qui a mis Paris sens dessus-dessous. Qu’en pensent les parisiens et comment vivent-ils cette mobilisation sociale entamée depuis le 6 mars par les éboueurs ?
La réforme des retraites en divise plus d’un depuis le 10 janvier et elle a de quoi. Le gouvernement souhaite fixer l’âge de la retraite à 64 ans minimum après 43 annuités de dure labeur. Une réforme qui apparaît injuste concernant notamment les métiers difficiles. Cette réforme a donc suscité de vives frictions avec la population et a réuni un nombre considérable de manifestants : 1,7 million de personnes selon la CGT pour cette huitième journée de grève le 15 mars, 480 000 selon le Ministère de l’Intérieur. En sachant que la journée record, le mardi 31 janvier, rassembla 1,27 million de manifestants selon la police.
Après la SNCF et la RATP, les éboueurs se sont également mobilisés et on peut dire que leur action est d’une grande efficacité. D’après la Mairie de Paris, le seuil des 10 000 tonnes de déchets a été franchis dans les rues parisiennes, de quoi inquiéter ses habitants qui croisent désormais des rats un peu partout dans la capitale.
Le 20 mars au soir, de nombreuses tensions proche de la gare Saint-Lazare ont eu lieu, un témoin nous raconte. Michael, 26 ans, se dirigeait au restaurant alors que la situation était plutôt calme. D’où sa grande surprise en sortant : “quand nous avons quitté le restaurant proche de Haussmann à 21h30, il y avait énormément de poubelles mais jusque là rien d’anormal.” Michael n’étant même plus surpris par la situation parisienne. “En arrivant au bout de la rue, les poubelles étaient cette fois-ci retournées et brûlées. On se croyait dans le tournage du prochain Batman à Gotham City.”

Crédits : 21 mars 2023, E. Amiri (DR)
Alina, 22 ans, habitante du 16e arrondissement, est confrontée à des déchets en bas de chez elle : “les rues sont de base très étroites, en y ajoutant les nombreux déchets, il est difficile de circuler à pied.”
Un habitant de Boulogne-Billancourt habitant à 50 mètres de la Porte de Saint-Cloud surpris par le spectacle nous raconte. Hugo, 25 ans, soutient totalement les éboueurs et leur cause.
Le métier d’éboueur a été longtemps méprisé. Aujourd’hui on se rend compte de l’importance des métiers de première ligne, un peu comme pendant le confinement avec le métier de caissier.
Hugo, 25 ans
Notre témoin part du principe que personne ne devrait se plaindre de cette mobilisation, cette action est non-violente et complètement légitime au regard de la réforme des retraites. Au lieu de partir en retraite à 57 ans, les éboueurs devront désormais s’arrêter à 59 ans.
Un éboueur témoigne dans ce reportage Brut.
Un habitant du 2e arrondissement, Sithia 25 ans, voit des entassements de poubelles tous les cinq mètres dans sa propre rue. Même si cela cause un problème d’hygiène publique, il comprend les revendications des éboueurs : “c’est un travail physique, difficile, peu gratifiant, cela me parait difficilement envisageable de les faire travailler deux ans de plus.” Il ajoute également que la réforme devait prendre en compte les métiers difficiles alors que nous voyons en réalité les “limites de ce modèle.”
En soutien aux grévistes, la maire de Paris Anne Hidalgo a refusé la réquisition des agents municipaux. En conséquence, le Ministre de l’Intérieur a demandé au préfet de police de Paris Laurent Nuñez de réquisitionner des éboueurs et des agents municipaux. “La réquisition est une remise en cause du droit de grève” affirme Régis Vieceli, Secrétaire Général de la CGT déchets et assainissement sur BFM Ile de France, choqué que des travailleurs soient forcés par la police de retourner au travail.
Paris n’est pas la seule ville touchée par le mouvement social des éboueurs, Nantes et Le Havre sont également concernées. Tandis qu’à Montpellier, Metz et Antibes, les grèves n’ont duré que quelques jours car une solution a été trouvée rapidement.
Lorsqu’il habitait à Marseille par le passé, Sithia nous explique que des grèves d’éboueurs ont eu lieu afin de contester leurs conditions de travail, des discussions qui ont abouti à des compromis. Contrairement à Paris où ces derniers sont obligés de retourner travailler : “je n’ai pas l’impression que leurs revendications seront écoutées, c’est comme si le débat était terminé avant même de trouver des solutions.” ajoute-t-il.
Cependant de nombreux risques, dont un problème d’hygiène publique, résultent de cette mobilisation, notamment causés par la prolifération de rats. Hugo assure que c’est un risque à prendre et un moyen efficace pour que le gouvernement retire cette réforme. “Il y avait déjà beaucoup de rats à Paris et bien sûr cela ne va pas améliorer la situation. Nous avons pu voir par le passé qu’il y avait des grèves avec de la casse, celle-ci au moins est non-violente. Je pense que le risque d’hygiène publique est à prendre.” conclue-t-il.
D’après Sithia, les revendications des éboueurs sont légitimes, mais ce dernier se sent impuissant au vue de la situation paradoxale : “la population parisienne ne peut pas les aider, moi y compris, et pourtant nous sommes directement confrontés au problème.”
Face à ces nombreuses grèves, le gouvernement a campé sur ses positions, jusqu’à faire usage du 49.3 afin de faire passer la réforme “par la force” sans même permettre le vote de l’Assemblée Nationale.
Je suis agacé par ce gouvernement, une impasse est en train de se créer car il y a des débats mais plus personne ne s’écoute. Il n’y aura sûrement pas de solutions et donc, beaucoup de déçus.
Sithia, habitant du 2e arrondissement de Paris
Ce sont les éboueurs et la Mairie de Paris, notamment Anne Hidalgo, qui sont pointés du doigt, pendant que le gouvernement passe entre les mailles du filet. Aucune décision n’ayant été prise, les éboueurs ont annoncé que la grève est reconduite jusqu’au 27 mars à Paris.
Macron déclarait non-officiellement qu’il réagirait uniquement “si Paris est en feu”, du ton ironique qui le caractérise. Le Président était bien loin d’imaginer jusqu’où peut aller la fougue des Français, un peuple pourtant habitué aux révolutions.
Sources : le JDD, Le Parisien, Le Figaro, franceinfo, RTL, France 3 Paris Ile de France, BFM Ile de France


Super article !
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